Appelez le CHANOIR 13 janvier 2020 – Publié dans: Articles
Vous êtes sans doute tombés nez à nez, au détour d’une ruelle ou dans une galerie d’art, sur un Cha, cette créature aux formes arrondies qui ont animé les murs de nombreuses capitales. Ces personnages thériantropes sont l’œuvre d’Alberto Verajano alias Chanoir. D’origine bogotanaise, il parcourra plus tard le monde où il laissera sa trace à chaque passage. C’est dans l’atelier de Jean-Michel Alberola, artiste majeure de la scène française des années 80, peintre, sculpteur, vidéaste ou artiste installateur que Verajano se voit recevoir le diplôme des Beaux-arts de Paris. Au travers de ses œuvres, Alberola se veut porteur de réflexions sur le monde actuel
Contrairement à son mentor, Chanoir assoit le coté apolitique de sa peinture. A l’inverse d’autres artistes de rue, comme Banksy ou Vhils, qui se servent de leur grafs pour faire passer des messages dénonciateurs, Chanoir ranime les émotions et l’innocence de l’enfance. L’émotion, c’est bien là le maitre-mot de l’artiste. Ses sentiments se font d’ailleurs largement ressentir dans ses toiles. Empli de créativité débordante, il ne sort jamais deux fois la même collection donnant à ses Cha tantôt des allures de tatoueurs, tantôt des allures d’aristocrate ou encore simplement des formes flottantes laissant à chacun libre court à son imagination. Jaloux, espiègle, moqueurs, Chanoir métamorphose ses personnages au grès de ses humeurs et la spontanéité de l’artiste se fait sentir à chaque pièce.
Pour parvenir à ce résultat à l’allure impulsive, sur ses toiles, il utilise les outils du graffiti pour faire de la peinture et donner de la vélocité à l’œuvre, lui permettant une technique plus rapide et instinctive. Ce qui l’anime c’est de faire passer un message seulement à l’aide de deux petits points et un petit trait, comme beaucoup de ses Cha, Chanoir veut poser un sourire sur tous les visages.
Aujourd’hui, ses œuvres sont présentées en galeries et lors de ventes aux enchères organisées par les plus grandes maisons de ventes ( Digard, Artcurial, Cornette de Saint Cyr… ).
Cinq étapes pour devenir graffeur
Bien qu’issu des Beaux-Arts, Chanoir estime que 5 étapes suffisent pour devenir graffeur, il nous prodigue ses conseils dans une vidéo à caractère ludique : Devenir graffeur en 5 étapes.
La première étape consisterait à se trouver un nom, la deuxième à se munir d’une bombe. Il préconise ensuite de vérifier d’être à l’abri des regards et de masquer son identité. Vient ensuite le dessin du flop. Le flop, c’est un peu le même principe qu’une esquisse. C’est un aplat de lettres arrondies qui forme les contours du tag simplement rempli.
La dernière étape : monter un crew.
Le crew : s’unir pour peindre ensemble
Membre fondateur du collectif franco-barcelonais 1980, c’est en 2013 que Chanoir réunit différents artistes comme Pure Evil, El Xupet Negre, ou Malicia autour d’un projet commun. Le collectif ne se concentre pas seulement sur le graffiti mais sur l’art en général afin de faire rentrer ses artistes membres en galerie. Leur ligne directrice est toujours la même : le retour en enfance, ils veulent remettre au gout du jour les images pop et acidulées de leur jeunesse, la jeunesse des années 80.
15 ans après, le collectif court toujours. Il célèbre son anniversaire lors d’une exposition « Broken Mind, Clever hands » en partenariat avec la ville de La Celle Saint-Cloud. Les artistes y présentent leurs archives mais également de nouvelles œuvres réalisées pour l’occasion.
Il y a 10 ans, le collectif propageait déjà sa happy wave lors de différents évènements comme par exemple la Biennale du Havre 2012, à l’espace LJ Beaubourg en 2007, différentes expositions au Musée des Art et Métiers en 2019, ou encore à la Fondation Cartier lors d’une exposition hommage à l’histoire du graffiti et ses artistes « Nés Dans La Rue » où le collectif installera une installation interactive « la mobile box ».
Le collectif investit également les lieux noctambules tels que Chez Moune, le Social Club ou le Nouveau Casino et deviennent une figure de la nuit parisienne, Chanoir se présente en tant que DJ cette fois-ci.
Ses collaborations
En 2012, Chanoir se confrontent à différents enjeux et se voit proposer de nouveaux défis. Grâce à ses dessins résolument pop et commerciaux, il est le candidat idéal pour les marques. Leur but ici : rajeunir leur image et toucher une nouvelle communauté.
Qui mieux que Chanoir pour dynamiser une marque ?
Il n’en est pas à son coup d’essai, Cacharel déjà avait flairé le potentiel d’une collaboration artistique et Chanoir s’était vu proposer la réalisation des imprimés des collections 2009-2011 et la décoration de l’ensemble des bureaux de la maison. Un pied dans la mode, il ne s’arrête pas là et réalise les bouteilles de parfum For Him & For Her de la marque Ungaro dont les flacons prennent la forme d’une bombe de peinture. Le lancement est prévu à l’international courant 2019.
En 2012 également, on pouvait apercevoir sur la conciergerie de Paris, une affiche géante réalisée par Chanoir faisant la promotion du nouveau téléphone Samsung SPen, il réalisera également différentes coques proposées à la vente.
L’année suivante, c’est quelques rues plus loin que l’on pouvait apercevoir une fresque « chanoirienne » sur les Champs-Elysées où l’artiste était invité par Disney à l’occasion d’Hallowen. On découvrira également une peinture murale réalisé sur l’enceinte de l’hôpital Saint-Louis.
Il investit les Galeries Lafayette de Dijon lors d’une exposition qui lui est consacrée : « Sous Le Totem De Chanoir ».
A la suite de ça, il recouvre le fameux hôtel Streets Hôtel de ses Cha colorés, dans le Marais à Paris.
Le groupe de rock alternatif Pixies à l’origine du très populaire titre « Where Is My Mind ? » présent dans le générique du film Fight Club, fait appel à Chanoir pour réaliser la fresque de son clip vidéo « Green And Blues » réalisé à Miami en 2014.
En 2016, c’est sur les iconiques briquets Clippers que les Cha apparaissent.
Récemment Chanoir replonge dans l’univers musical, on peut apercevoir Chanoir à l’œuvre dans le jeu vidéo Just Dance, réalisant une fresque en fond sur le son très pop de Bum-Bum Tam-Tam.
Cette année encore, le club parisien mythique Le Montana fait appel au service de Chanoir pour faire vivre une dernière fois sa devanture avec la fermeture définitive du lieu. L’artiste investira les murs de la boite pour un solo-show.
Dernière collaboration en date, Chanoir s’associe avec les boulangeries Gana et proposent une sélection de fèves à retrouver dans les galettes des rois !
Chanoir ouvre son univers au plus petit dans le livre pour enfants On fait le mur ? autour de l’art dans la rue.
Où retrouver ses oeuvres ?
Convaincu que l’art et les artistes sont des acteurs porteurs de messages optimistes, c’est dans la rue que Chanoir a choisi de s’exprimer depuis 25 ans. Présent dans une dizaine de pays, vous trouverez Chanoir où que vous alliez.
Dans les rues
Un des murs notoire de Chanoir est bien sûr le Wynwood Walls à Miami.
Wynwood, ce quartier d’entrepôts industriels vieillissants redoré à l’occasion d’Art Basel 2009 par l’homme d’affaire et mécène Tony Goldman qui transforme le lieu en centre culturel à ciel ouvert et devient un canva d’expression pour l’art urbain. Chanoir y fera vagabonder ses Cha en 2013.
Au musée
En 2003, les Cha font leur entrée au musée. Chanoir est exposé au Musée d’art Moderne de Bogota (MAMBO) fondé en 1963 par la critique d’art d’origine argentine Marta Traba. Actuellement situé dans le centre-ville de la capitale, le musée présente plus de 2 000 œuvres d’artistes étrangers et colombiens.
En galerie
Depuis 2014, Chanoir est représenté par la Galerie Art Jingle fondé par Stéphane Bou, où ses œuvres sont à retrouver au 31bis rue des Tournelles, dans le Marais à Paris.