Fernando COSTA, Sculpteur 15 janvier 2020 – Publié dans: Articles

Fils d’immigré portugais, réfugié à Sarlat, Fernando Costa ne quittera jamais sa ville natale et deviendra une figure emblématique du petit village périgueux.

Comme ses frères, Fernando Costa passe un CAP Hôtellerie qui le mènera à bord du Queen Elisabeth 2 où, plus jeune employé du navire il restera steward plusieurs années. Lors de ses traversées, il rencontrera différents artistes qui lui donneront le goût des belles choses. Pourtant, sa première rencontre artistique date de bien plus tôt, c’est en regardant une émission télévisée chez sa grand-mère, à 13 ans que Costa entend pour la première fois parler de César. Il voit l’artiste à l’œuvre, tordre des voitures et trouve le concept « marrant ». Plus tard, lors d’un voyage scolaire à Paris, au musée Beaubourg, il retombera sur les sculptures de l’artiste qui l’avait interpellé quelques années plus tôt. Sous les railleries de ces camarades, Costa annonce qu’il veut faire de l’art comme César, il sera encouragé par la guide mais surtout animé par le destin commun qu’il partage avec le maitre, tous deux capricorne et fils d’immigré. C’est l’année de la mort de César que Costa réalisera ses premières pièces. Seulement, avant de devenir Costa, Fernando doit d’abord trouver une matière à travailler. C’est lors d’un déjeuner à Los Angeles, à bord de son paquebot de croisière, en compagnie de son meilleur ami prenommé César (coïncidence ?), qu’il remarque une famille américaine pique-niquant sur une table de fortune fabriquée en panneau de signalisation « Speed Limit ». Il vient de trouver sa matière de prédilection dont il tombera rapidement amoureux. Il rentre en France dans son village, les idées plein la tête. Il contacte la Départementale des Equipements de Sarlat qui accepte de lui refiler les panneaux de signalisations périmés du département. 20 ans plus tard, c’est avec des panneaux d’origines pléthoresques qu’il travaille, il récupère les plaques de rues émaillées, explore les ateliers municipaux, la RATP, les chantiers, les émailleries…

La matière

Il aime l’idée de donner une seconde vie à des morceaux de métal témoin de leur époque, racontant une histoire, ayant vu défilé les habitants, les touristes, des panneaux de métal colorés qui égayent les rues, qui indiquent une direction, qui donne un sens à la vie quelque part. Des plaques qui ont évolué au fil du temps, de l’histoire. Si César s’était tourné vers le métal faute de moyen, la démarche de Costa est bien volontaire.

Costa ne jette rien. C’est avec les « chutes » de ses découpes qu’il crée ses monochromes, ses abstractions colorées, ses contre-points détonnant… Ainsi, chaque œuvre est liée à l’autre, les panneaux sont démembrés pour être mieux ressoudés, tel des squelettes colorés et emplis d’histoire, inspiré par les processus à la chaine des usines industrielles, où une tâche ne fonctionne pas sans l’autre.

Le processus

Le processus de création suit des étapes de montage bien précises que Costa accomplie avec une précision sans faille et une rapidité comme seuls les experts en sont capables : après réception des panneaux il s’occupe d’abord de les tailler, à l’aide de cisailles, il découpe les pictogrammes, construit des formes, isole les mots. Il polit une première fois les pièces devenues coupantes puis les places les une à côté des autres jusqu’à obtenir la bonne composition et balance de couleurs. Une fois satisfait, les pièces sont soudées sur plaque de tôle et polies une dernière fois afin de rendre l’œuvre parfaitement saine. Eventuellement, Costa appose une couche de vernis en finition à l’aérosol lorsque l’esthétisme s’y prête, qu’il laissera sécher.

Après la soudure

C’est un travail ferroviaire important que Costa exécute seul. Dû à son quotidien très physique, Costa se fait remettre tous les mois cervicales et lombaires soumis à rude épreuve par le poids des cisailles et le pliage du métal.

Sculptures

Costa ne s’arrête pas aux sculptures couchées. Ces sculptures levées, montées sous plusieurs angles caractérisés par leurs compositions de pictogrammes des années 50 découpés au laser et leurs couleur bleue cobalt reconnaissable de loin. Une fois les pièces soudées, la sculpture est passée au four à 200° durant 30 minutes avec projection d’une couche de blanc, quand la pièce est refroidie, on applique le bleu sur la tôle encore chaude qui va le  dilater et l’étaler aux extrémités. Ensuite, la seconde cuisson à 200° dure une heure.

L’apprentissage

Costa a les idées et la matière, il lui reste à apprendre la technique. C’est dans un atelier de ferronnerie à Souillac que Costa se rend pour apprendre le métier avec René Peyllod. En plus de la force physique, le travail ferroviaire doit être réalisé minutieusement et de manière appliquée. A la suite de sa formation, Fernando louera le poulailler de son mentor, qu’il transformera en atelier. Rapidement, il n’a pas les moyens de payer son loyer, ni même de se nourrir. Pendant dix-huit ans, convaincu du talent de leur protégé et de son destin hors du commun, René et sa femme prêteront gracieusement leur atelier et proposerons une assiette chaude à Costa chaque jour.

La consécration

Bien qu’inspiré de César, il ne suit aucun mouvement, ou alors il les mélange. Pendant 8 ans, Fernando ne vend rien. C’est lors d’une exposition en maison de retraite qu’une résidente lui donne le contact de son petit-fils qui est dans le monde de l’art. Il le fera rentrer au Grand Marché d’Art Contemporain de la Bastille en 2005. En 50 minutes, il vend les vingts-six tableaux exposés et voit sa vie bouleversée. C’est ce même jour qu’il rencontrera différents galeristes et notamment Stéphane Bou, qui lui est resté fidèle aujourd’hui. Directeur de la Galerie Art Jingle, voilà ce qu’il dit de lui : «

En 2013, il est  le 18ème artiste au monde désigné pour créer l’ « Art Car » des 24 h du Mans. Il succède à Warhol, Calder, Jeff Koons, Arman et bien sûr César. Réalisée en deux mois à partir des podiums de la compétition automobile, Costa propose une Art Car de plus de 500 kilos

Humble Costa

Costa a su rester humble. Il veut rendre l’art contemporain accessible à tous et ouvre volontiers de son atelier à qui le souhaite. Il achète une Porsche noire mais il trouve qu’il à l’air « con » dedans. Il décide finalement de la découper pour en faire 20 tableaux qui seront exposés à Montauban en juin 2019. Le démontage est prévu en janvier 2020 et fera l’objet d’un film.

 

Ses expositions

A 25 kilomètres de Sarlat, Costa connait un autre refuge ; les grottes de Lascaux IV. Il s’y rend souvent en pèlerinage et est devenue ami avec André, le directeur des lieux. Costa aime se ressourcer près des pierres, emplies d’histoire et de passée. Il prépare actuellement un projet en lien avec le lieu préhistorique prévu courant 2020.